De la vérité devant la justice magique – 3

C’est sans doute pour toutes ces raisons que la justice magique interdit que l’on ne pénètre l’esprit des accusés – du moins sans leur accord. Les éléments de preuve issus de ce genre de méthode ne sont pas non plus retenus.

Les droits élémentaires de la défense s’opposent férocement à ce genre de pratique. En effet, s’il paraît immoral d’autoriser de facto un accusé à mentir sous serment devant le tribunal puisqu’on ne met pas tout en œuvre pour l’en empêcher, il est également illégal de l’obliger à participer à sa propre accusation.

Comme vous l’avez peut-être déjà lu dans des polars juridiques américains, les accusés ont le droit de garder le silence : c’est un droit constitutionnel, qui leur est reconnu dans le 5ème amendement de la Constitution américaine, et qui leur est rappelé dans cette fameuse affirmation des droits « Miranda » depuis 1966.

Ce droit est reconnu dans la plupart des pays occidentaux, et notamment les États appartenant à l’Union Européenne. Ils sont en effet soumis à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits Humains, entrée en vigueur en 1953. Son article 6, relatif à la notion de « procès équitable », est l’un des plus importants. Il donne lieu à de nombreuses condamnations d’Etats pour torture, extorsion d’aveu, non respect du droit à disposer d’un avocat, violation du droit à garder le silence : ce fut notamment le cas en France dans les affaires « Selmouni » et « Tomasi » en 1989, puis « Salduz » (2007), « Dayanan » (2009), « Brusco » (2010)… Bref, depuis l’arrêt « Murray contre Royaume-Uni » en 1996, les droits de la défense sont constamment réaffirmés à travers la protection du droit au silence.

Pourquoi ? Parce que vous pourriez être la pire des crapules que cela ne donnerait pas le droit à votre État de vous condamner sans preuve, sur la base de témoignages biaisés ou de vos déclarations triturées de manière à vous mettre en cause. C’est une question de principes, principes qui parfois choquent beaucoup la population dans les cas de crimes barbares. Mais qui s’expliquent par l’innocence potentielle de chacun.

« Mais alors, découvrons-vite en fouillant dans sa tête s’il est véritablement coupable, et condamnons-le ! » Ce n’est pas aussi simple.

Vous ne pouvez obliger quelqu’un à ne pas suivre la ligne de défense qu’il a choisie. Il a parfaitement le droit de faire valoir des arguments dans le sens de sa défense. Il peut même arriver que pour arriver à la Justice, il faille mentir… les apparences sont parfois trompeuses, comme peut nous montrer la série moldue Accusé.

La Justice n’est pas forcément là où se trouve la Vérité : les juges, comme les accusés, comme les victimes, sont des humains. Aussi insupportable que cela puisse paraître, parce que la justice n’est pas infaillible, parce que la loi n’est pas une formule mathématique appliquée à un cas concret, la Vérité ne mène pas forcément à la justice légale.

Vous estimez que cela vous pose un profond problème moral ? Rendez-vous au prochain chapitre !

Texte initialement publié sur le forum Poudlard12.com.

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